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Vitamines, nutrition et schizophrénie

Par Neptune 

le 19/02/2018 

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Vitamines, nutrition et schizophrénie


Résumé


Cet article est une introduction à l'histoire – non achevée – du traitement de la schizophrénie par un régime alimentaire personnalisé, accompagné de la prise de vitamines particulières et de quelques autres suppléments en quantités plus importantes que celles généralement admises par la communauté médicale. Nous avons pensé qu'un historique factuel serait utile pour un sujet trop souvent rapidement assimilé au mieux à une médecine parallèle. Nous citons autant les promoteurs de cette médecine dite "orthomoléculaire", que les principales études contradictoires ou confirmatoires faites par d'autres chercheurs non partisans.

Les pionniers de ces thérapies, Abram Hoffer (1) et Humphry Osmond (2) ont cherché dès les années 1950 à décrire la schizophrénie par des causes biologiques. Ils identifieront plusieurs causes possibles et indépendantes, théorisant la schizophrénie comme syndrome commun à plusieurs maladies biologiques, en particulier des maladies causées par des dépendances ou à des carences en certains éléments naturels. Les découvertes se succèderont, aboutissant à des protocoles de traitement affinés de décennie en décennie, donnant des résultats de plus en plus prometteurs à mesure que le protocole de détection et de soin s'adapte à ces découvertes.

1. L'hypothèse adrénochrome et la vitamine B3 - 1954




L'adrénochrome est le produit de l'oxydation de l'adrénaline :
    Noradrénaline + groupe méthyl => Adrénaline
    Adrénaline + oxygène => Adrénochrome.
L'adrénochrome étant hallucinogène, tout ce qui conduit à une quantité importante d'adrénochrome peut alors être une piste de recherche clinique, et le fait de limiter sa quantité peut aussi être une piste thérapeutique.

Hoffer et Osmond observent que la pellagre, maladie grave due à la carence en vitamine B3, présente des symptômes similaires, lors de son début, à ceux de la schizophrénie. Or la vitamine B3, ou niacine, capture les groupes methyl de la réaction ci-dessus, ce qui limite la production d'adrénaline et donc, mécaniquement, d'adrénochrome.

Ils administrent des quantités importantes de vitamine B3 à des patients schizophrènes (en plus du traitement conventionnel) et obtiennent des résultats encourageants et parfois spectaculaires.

Ils obtiennent un budget de recherche conséquent par la Fondation Rockefeller pour étudier les implications cliniques de cette hypothèse sur 6 ans.

Entre 1957 et 1960, ils publient les résultats d'études, dont plusieurs sont randomisées en double aveugle contre placebo, sur l'effet de l'adjonction de vitamines B3 (niacine et niacinamide) au traitement neuroleptique dans la schizophrénie.

2. Les kryptopyrroles et rôle de la vitamine B6 – 1960-67




Au cours des années 1960, ils découvrent que les patients schizophrènes et les personnes traitées au LSD contre le delirium du sevrage alcoolique, ont en commun la spécificité de rejeter dans leurs urines des kryptopyrroles. Celles-ci fixant le zinc et la vitamine B6 ("pyridoxine") en provoquent la carence par élimination rénale.

Ce rapprochement a été rendu possible par le fait qu'Osmond était par ailleurs un des expérimentateurs, dans cet hôpital du Saskatchewan, de la thérapie consistant à soulager le délirium tremens alcoolique par du LSD. Inventeur du terme de "psychédélisme", Osmond sera par la suite mêlé à de nombreuses polémiques dans le milieu médical, et ceci aura pu jouer en défaveur des découvertes présentées ici sur la schizophrénie.

L'administration modérée de vitamine B6 - moins d'un gramme - s'ajoute alors au traitement contre la schizophrénie. Mais bien que les kryptopyrroles concernent surtout les personnes schizophrènes, une étude à grande échelle montre en 1961 (3) qu'une petite partie de la population non schizophrène en rejette également. Les kryptopyrroles ne seront donc pas retenues comme "test de détection biologique" de la schizophrénie, mais donnent aux chercheurs l'idée d'une seconde étiologie possible, ou type de schizophrénie, la "pyrolurie" ("pyrroleuria").

(3) Hoffer A & Mahon M: The Presence of Unidentified Substances in the Urine of Psychiatric Patients 2:331-362, 1961


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(1) Abram Hoffer (1917-2009) est un biochimiste, médecin et psychiatre canadien, originaire de la province du Saskatchewan. Diplômé "Bachelor of Sciences" et titulaire d'une Maîtrise en Chimie Agricole, il a débuté sa carrière dans un laboratoire agro-alimentaire aux USA, puis obtint un doctorat de biochimie en 1944, avec une thèse portant en particulier sur les vitamines B. Il suivit ensuite des études de médecine et obtint son doctorat de médecine en 1949 après un internat à l'Université de Toronto. Intéressé par la psychiatrie, il fut recruté par le Départment of Public Health du Saskatchewan en 1950 pour mener des recherches en psychiatrie, et intégra les services psychiatriques de la capitale Regina en 1951, qu'il ne quitta qu'en 1967 pour s'établir en libéral à Saskatoon. Il fonda sa propre revue en 1967, "Journal of Schizophrenia". En 1966 il fit découvrir, avec Irwin Stones, la thérapie de supplémentation par des "mégavitamines" à Linus Pauling (5). Abram Hoffer s'installa en 1976 à Victoria près de Vancouver jusqu'à sa retraite en 2005. Il ne ménagea jamais le système psychiatrique qui depuis 1973 conteste ses résultats, et fut considéré au mieux comme un "opposant".

(2) Humphry Osmond (1917-2004) est un psychiatre d'origine anglaise expatrié au Canada. En 1951 il rejoint l'hôpital de Weyburn, Saskatchewan, à 100km de Regina. Il commença par étudier les similitudes entre LSD et psychoses, et se passionna pour les hallucinogènes au point d'en tester les effets thérapeutiques sur le delirium alcoolique. Esprit libre il orienta ses recherches dans de multiples domaines peu consensuels. On lui doit le terme de "psychédélisme" (1956). Article Wikipedia
How to live with schizophrenia 1967
(4) How To Live With Schizophrenia, "Comment vivre avec la schizophrénie" Hoffer & Osmond, 1967

(5) Linus Pauling (1901-1994) est prix Nobel de Chimie en 1954, puis de la Paix en 1962. En 1968 il adopta avec enthousiasme la thérapie orthomoléculaire (6) et s'employa à la promouvoir dans le monde entier, jusqu'à son décès en 1994, provoquant de nombreuses polémiques dans le milieu scientifique et médical.

(6) La médecine orthomoléculaire se définit comme mettant en œuvre les "ortho – molécules", littéralement "molécules correctes", qui sont des molécules déjà connues de l'organisme, soit parce qu'ils les rencontre depuis des millénaires, soit parce qu'il les synthétise lui-même. Les vitamines sont un exemple parmi d'autres de ce type de molécules.

(7) Voir notre chapître sur le jeûne thérapeutique en psychiatrie

(8 ) NIMH : National Institute of Mental Health, principal institu de recherche en santé mentale aux USA.

(9) Wittenborn JR, Weber ESP & Brown M: Niacin in the long term treatment of schizophrenia. Arch Gen Psychiatry 28:308-15, 1973.

(10) Wittenborn JR: A Search for Responders to Niacin Supplementation. Arch Gen Psych 31:547-552, 1974.

(11) APA : American Psychiatric Association

(12) Kunin, R. A. "Manganese and Niacin in the Treatment of Drug-induced Dyskinesias." Journal of Orthomolecular Psychiatry 5: 4-27, 1976

(13) Hawkins, D. R. "The Prevention of Tardive Dyskinesia with High Dosage Vitamins: A Study of 58000 Patients." Journal of Orthomolecular Medicine 1: 24-26, 1986

3. La création de la "médecine orthomoléculaire" et le début de la polémique - 1968




Depuis 1955, les neuroleptiques sont devenus dans le monde occidental le traitement unique des schizophrénies. Les neuroleptiques sont une réelle révolution, car ils font suite à des traitements barbares et très invalidants comme l'insulinothérapie, les électrochocs sans anesthésie, la lobotomie, etc. Dans ce contexte, peu de gens s'intéressent aux travaux et aux résultats annoncés par Hoffer et Osmond, ni aux autres thérapies nutritives. Hoffer et Osmond publient en 1966 leur premier ouvrage destiné au public "How to live with schizophrenia" - Comment vivre avec la schizophrénie (4) - qui décrit leur méthode et leurs résultats.

Les ouvrages des pionniers du traitement par la vitamine, donc de Hoffer/Osmond d'une part, et d'Irwin Stone, spécialiste des thérapies à base de vitamine C d'autre part, finissent par atterrir sur la table de chevet d'une personnalité très connue, Linus Pauling (5).

Linus Pauling popularise très largement les traitements par vitamines et invente le terme de "médecine orthomoléculaire" (6) en 1968 après avoir rencontré à New York Abram Hoffer et Irwin Stone. Il s'en suit une vive polémique : le rejet violent fait alors suite à des années de non prise en considération des travaux de Hoffer et Osmond. On leur reproche essentiellement un manque de méthodologie.

4. La découverte des intolérances alimentaires - 1971




En 1971, le Dr Cott revient d'une mission d'étude en URSS auprès des praticiens moscovites du jeûne thérapeutique (7), et raconte, entre autres, le traitement par le jeûne de patients schizophrènes chroniques. Le Dr Hoffer essaye alors sur quelques patients un jeûne de quelques jours, et relate des effets positifs spectaculaires : disparition de symptômes paranoïaques aigus, d'un état catatonique, etc. Puis il réintroduit les d'aliments un par un, avec l'idée de détecter si un des aliments est responsable d'une "allergie cérébrale". Ce fut souvent le cas : des crises de même type qu'initialement réapparaissaient lors de la réintroduction d'un aliment ou d'un autre produit ingéré, variable d'un patient à l'autre : viande, aspirine, tabac, etc.  

Il améliore alors sa thérapie en faisant commencer sa prise en charge par un processus de détection d'intolérances alimentaires, qui lorsqu'il est avéré est traité par exclusion des produits incriminés. Il parvient alors à rétablir des patients qui ne voyaient pas d'amélioration avec la prise massive de vitamines B3, et bien sûr aux neuroleptiques. La technique employée est de préférence l'alternance des aliments d'un jour à l'autre jusqu'à détecter lequel est responsable, ou parfois, pour 5 % de ses patients, par une période de jeûne de quelques jours suivi de la réintroduction un par un des aliments.
 

5. La reproduction des résultats par Wintterborn 1973 – 1974




En plein polémique, le NIMH (8 ) finance une étude destinée à tenter de reproduire sinon à invalider les résultats annoncés par Hoffer. Le Dr Wintterborn JR du New Jersey publie des résultats qui contredisent ceux de Hoffer (9). L'institution médicale et psychiatrique diffuse largement les résultats de Wintterborn.
Hoffer et Osmond répliquent que les patients analysés par Winttenborn étaient des patients chroniques, alors que ceux ayant obtenu de bons résultats dans leurs publications étaient des patients en début de maladie.
Winttenborn refait alors ses comptages, et reconnaît à demi-mot en 1974 qu'ils correspondent à ceux de Hoffer et Osmond : "Il est possible que les patients avec une psychose dissociative et une histoire de participation à la thérapie puissent répondre positivement à la niacine à haute dose en supplément d'autres médications et traitements. Cette hypothèse est base sur les recherches a posteriori, non encore soumis à un scrutin de validation". (10)

Hoffer et Osmond accuseront ensuite l'APA (11) d'avoir délibérément ignoré la seconde publication de Wintterburn, et attendront vainement que l'APA tienne sa promesse de répondre à leur requête de réexamen de la position officielle mettant à l'écart le traitement pratiqué par les psychiatres orthomoléculaires.  

6. Les autres vitamines et additifs




Peu à peu et jusqu'à sa retraite en 2005, Hoffer affine la méthode : en plus des doses thérapeutiques de niacine et niacinamide (3 à 6 grammes/jour), de la vitamine B6 (1 g), de l'élimination des intolérances alimentaires, Hoffer ajoute jusqu'à 3 grammes de vitamine C, et veille aux apports d'acides gras essentiels comme les Omega 3.

Pour combattre et prévenir la dyskinésie tardive induite par les neuroleptiques (mais aussi par certains des antipsychotiques dits de seconde génération), il ajoute du manganèse à partir de 1976, suite aux travaux de Kunin (12). Ceci sera conforté en 1986 par D.R.Hawkins, qui constate qu'aucun des 58 000 patients traités par la médecine orthomoléculaire, n'avait de dyskinésie tardive (13).

Il surveille les progrès de la recherche concernant l'acide folique (vitamine B12) sans en prescrire toutefois sauf dans les indications conventionnelles. Il prescrit des apports en zinc et, à partir de 1993, de sélénium.

L'empathie et la disponibilité active du psychiatre sont également mis en avant : la longueur du traitement dans les cas difficiles des schizophrénies chroniques durant depuis plusieurs années, impose patience et persévérance.    

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7. Guérir la schizophrénie - Les résultats - 2005




C'est par ce titre (14) qu'Abram Hoffer, pionnier du traitement de la schizophrénie par les vitamines, lègue aux générations futures le résultat de 55 années de travail, de réussites et de combats au sein de l'institution médicale nord-américaine.

Il y livre son savoir lentement consolidé, et les ultimes résultats qu'obtiennent les quelques psychiatres convertis à ses méthodes :

GroupeDurée du traitement orthomoléculairePourcentage de réussite (15)
A. Un an de maladie, ou lors de la 2eme ou 3eme rechuteJusqu’à 1 an90 %
B. Deux à 5 ans de maladieJusqu’à 5 ans75 %
C. Plus de 5 ans de maladie, mais non hospitalisé5 années ou plus50 %
D. Plus de 5 ans de maladie, hospitalisé 5 années ou plus25 %

8. Perspectives




Si ces traitements ne se sont pas développés comme ils l'auraient dû, c'est à notre avis dû à la médiatisation mondiale de la polémique sur le cancer et la vitamine C. Certaines dérives de la naturopathie commerciale, les intérêts contradictoires, le conservatisme des corporations, ont fini par donner au terme "médecine orthomoléculaire" une connotation péjorative. Le ton ouvertement polémique de la plupart des articles de cette école, en commençant par le Dr Hoffer lui-même, est également contre-productif dans un domaine où la forme compte autant que le fond.

Cette thérapie complémentaire (et non substitutive) ne se développe pas comme elle l'aurait dû, et elle est cataloguée "médecine parallèle", sans que ses fondements n'aient pu être formellement contestés, au contraire. Par exemple, aucune étude qui reproduise les conditions et protocoles de traitement de la schizophrénie par la nutrition et les apports en molécules naturelles d'Abram Hoffer, ne peut contredire formellement les résultats annoncés. Au contraire, les quelques recherches effectuées, dans des conditions proches bien que différentes, montrent le plus souvent l'intérêt élevé de chacun des éléments mis au point.

Régulièrement, des recherches ponctuelles reviennent sur la question et sont publiées. Par exemple, celle de Smedslund en 2011 (16), ou de Firth & all en 2017 (17). Le problème de ces études est que ce sont des méta-analyses, donc des études d'études, qui manquent toutes cruellement de matériel à étudier : très peu de praticiens hospitaliers ont en effet récemment appliqué la méthode orthomoléculaire, et donc toutes ces méta études concluent globalement que "la méthode semble donner des résultats significatifs, mais la méthodologie fait que le niveau de preuve est faible". En d'autres termes, personne n'infirme ni n'ose confirmer ces résultats. On attend donc encore un hôpital et des médecins hospitaliers courageux pour réellement étudier cette thérapie, car les "revues de littérature" ne peuvent plus rien apporter.  

Les faits sont têtus, et les faits biologiques encore plus. Tout comme le jeûne thérapeutique, pour lequel les autorités occidentales commencent à manifester un intérêt certain, et à l'instar des progrès de l'immunothérapie et des sciences nutritives. La prise en charge des troubles psychiques par des produits naturels millénaires scientifiquement étudiés et prescrits en première intention, ne pourra que s'imposer tôt ou tard.

Neptune


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